Pas question de fermer
Au n°92
Sur l’axe Euroméditerranée, le gérant de l’école de conduite et ses quatre employés ne sont plus les bienvenus. Après trente-quatre ans d’exercice sur la rue de la République, le bail ne sera pas renouvelé. Restructuration commerciale oblige.
Koinai : Depuis combien de temps vivez-vous dans le quartier ?
- Depuis mille neuf cent soixante-douze .
K : Êtes-vous contraint de partir ?
- Oui, on ne m’a pas renouvelé le bail. C’est tout simple, le bail arrivait à expiration en septembre, donc là il est pas prolongé pour quelques temps. Mais il n’est pas question de fermer et de mettre quatre pères de famille à la rue. Je vais m’installer au boulevard des Dames dans des locaux deux fois plus petits et deux fois plus chers. Comme tout dans la vie, les riches, de plus en plus riches et les pauvres, de plus en plus pauvres.
K : Que disent les autres commerçants de la rue ?
- Je ne sais pas, je ne sais pas. Je pense qu’ils ne sont pas contents comme moi, ça c’est évident, parce que lorsque les locaux seront remis à neuf, il est pas sûr qu’ils reviennent au même endroit, c’est même peu probable.
K : Pourquoi ne vous êtes-vous pas organisés en collectif ?
- S’il y avait un collectif !
K : Que pensez-vous du projet de restructuration des commerces ?
- C’est ambigu : restaurer la rue, elle en avait vraiment besoin, c’est évident et ça peut apporter du bien-être et du travail à du monde. Maintenant il faut voir comment cela est fait et qui on chasse également.
K : Aviez-vous déjà été confronté à des projets de ce type ?
- Depuis soixante-douze, j’ai connu les travaux du métro qui ont levé pas mal de travail parce que les gens qui attendaient un bus étaient des clients potentiels, puisque tout se passait par dessous désormais ; après, il y a eu le ravalement des façades qui a également pénalisé lourdement dans le but d’embellir. Il est évident qu’une fois que les façades étaient terminées, elles étaient magnifiques. Mais bon, elles sont de nouveau noires, mais c’est vrai que la rue est belle, c’est la plus belle rue de Marseille. Voilà les deux plus grands dénouements que j’ai connus ici.
K : Qu’attendez-vous des travaux ?
- Si ça peut embellir la ville dans laquelle je suis né, c’est une bonne chose, mais ça n’apportera pas grand chose puisque je n’y serai plus.
Propos recueillis le 08/02/06 par Ahmed Messis ; rédaction : Patricia Rouillard.
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