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La revue du témoignage urbain

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Femme aujourd'hui

Une capacité à tout gérer

Nadia, femme courageuse de quarante-cinq ans, travaille en tant qu’employée de ménage, tous les matins à l’ouverture des bureaux et tous les soirs à leur fermeture, pour pallier les revenus insuffisants de son mari et les difficultés financières qui ne cessent de s’alourdir avec le passage à l’euro. Le reste de la journée, elle s’occupe de son foyer et de ses enfants.


Une vie de femme :
Ça fait vingt ans que je suis ici en France. J’aime bien ma personnalité, je suis une femme capable dehors et dedans. C’est un peu dur, mais il faut le faire, il faut y aller. J’aime bien ma personnalité, être une femme, parce que les femmes sont bien capables de tout faire, tous les boulots ! C’est vrai que c’est fatiguant, mais c’est la vie, on n’a pas choisi... En plus, on a des enfants, il faut s’en occuper et travailler en même temps, prendre toute la responsabilité de la vie de la femme. Ça ne m’empêche pas de vivre une vie de femme normale. On peut s’arranger, se pomponner, sortir un peu de temps en temps, s’il y a des fêtes. Le reste du temps, on n’a pas toujours l’occasion de faire ce que l’on veut. Mais c’est vraiment dur ! La vie est dure et la femme travaille, travaille et travaille encore : dehors, à la maison... C’est dur pour elle, mais c’est comme ça ! Mais on a toujours le sourire, toujours ! On est en bonne forme sauf parfois. Ça arrive qu’il y ait des hauts et des bas, et notamment avec les enfants.

Les enfants : Il faut les surveiller, les faire bouger, parce que les enfants d’aujourd’hui sont tellement fainéants, qu’il faut toujours être derrière. Ils ne font rien et c’est dur pour moi, pour tout le monde, pour toutes les mamans, pour toutes les femmes.
Les enfants peuvent nous aider, mais c’est rare. Maintenant, ils sont vraiment fainéants. Dès qu’ils se lèvent, ils disent qu’ils sont fatigués. Et quand ils rentrent de l’école, ils sont encore fatigués. Leur vie, c’est la fatigue. Donc il n’y a que la maman pour tout faire. Elle est là. Du papa, je n’en parle pas, parce que certains papas sont bien et d’autres ne le sont pas. Donc moi, je suis comme une mère au foyer. C’est vraiment dur pour moi, mais je suis comme une femme d’avant. Je suis capable de tout assumer. C’est pour les femmes en général que je parle. Et puis, on est en vie, on vit bien, avec un peu de difficulté parfois et un peu de chômage. Grâce à Dieu, moi je ne l’ai pas beaucoup connu.

Question financière : Il y a d’autres femmes qui ne veulent pas se lever de bonne heure. Moi, je me lève à quatre heures du matin, mais c’est rare qu’une femme se lève aussi tôt et qu’elle ait une vie aussi dure. Les femmes cherchent du travail, mais n’en trouvent pas. J’ai peur le matin quand je vais travailler, car la sécurité a diminué. On marche et on a peur de sortir le matin. On a très peur maintenant. Ce n’est que depuis ces trois dernières années que j’ai aussi peur, parce qu’il n’y a pas de sécurité pour nous le matin. Il faut pendre le métro et il n’y a pas de sécurité, il n’y a rien du tout. Comme on a besoin de travailler, il n’y a que le bon Dieu qui est avec nous. Je parle pour la plupart des femmes, parce que moi, le matin quand je me lève, quand je vais travailler, je ne vois que des femmes. C’est rare qu’on trouve des hommes à cette heure-là. Question financière... Depuis le passage à l’euro, les gens sont vraiment dans la pauvreté. Même s’ils travaillent, ils n’arrivent pas à s’en sortir. Donc l’euro, c’est vraiment une erreur. La plupart des gens ne veulent plus travailler. Avec le travail, le RMI ou le chômage, tout le monde pleure à cause de l’euro, parce qu’ils n’arrivent pas à s’en sortir. Comme tous les prix ont été arrondis, la vie est chère. On n’arrive pas à se débrouiller. On vit comme on peut : on mange et c’est tout ! On ne peut plus s’acheter de trucs comme avant. On n’arrive pas à acheter de cadeaux de Noël. C’est pareil pour s’offrir des petits trucs, même peu, parce que la vie est chère. On nous dit qu’il y a des soldes, mais je ne vois pas la différence avec les prix ordinaires. Il n’y a rien de changé, sauf peut-être pour les riches, mais pas pour les pauvres. Ils sont toujours pauvres et ils n’arrivent pas à s’en sortir.

Propos recueillis par Moufida Kerrouche, janvier 2005

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