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Quatre voitures dans mon garage - Mutations urbaines - Les transports marseillais en mouvement - Circulations - La revue du témoignage urbain

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Circulations

Quatre voitures dans mon garage

"J’habitais à la Joliette, à l’époque où la vie était belle sans les travaux ni le stationnement payant. Ensuite, j’ai déménagé pour le Vieux-Port. Là, hors de question pour moi de garder une voiture, je m’en suis séparée. AutoPartage a été un super bon compromis parce que je travaille à la maison, mais je suis amenée à rencontrer des clients en ville ou aux alentours. Quand je n’ai pas de temps à perdre dans les transports en commun, j’y ai recours pour utiliser une voiture deux heures, trois heures, la journée..." Emmanuelle Atteïa.


 

Koinaï : Le problème de parking se posait-il quand vous étiez à la Joliette ?
C’était un petit peu plus serein qu’aujourd’hui, c’est vrai. Le problème de parking s’est posé au Vieux-Port plutôt qu’à la Joliette. En pesant le pour et le contre, en voyant que je bossais à la maison, que mes clients étaient essentiellement au centre-ville et que finalement la voiture était plus un fardeau qu’autre chose, pour tout ce qu’on sait : le stationnement, les amendes, une assurance qui finalement sert juste pour un jour par semaine... la prendre, c’était absolument pas logique. Puis, petit à petit, comme mon travail se passe bien - tant mieux - et que j’ai des clients un peu moins proches (Vitrolles, Aix, Marseille sud et cætera), je me suis dit que j’en avais besoin, mais sans en avoir les contraintes.

K : À propos d’auto-partage, peut-on parler de co-voiturage ?
C’est encore autre chose. AutoPartage est une société qui a été montée il y a quelques temps, je ne pourrais pas vous dire l’historique exact, et qui est implantée à Marseille depuis un an ou deux. Le principe est très simple, c’est de mettre à disposition des voitures dans cinq parkings à Marseille, pour ceux que je connais il s’agit de Bourse, Préfecture, la Plaine, le Cours Julien... j’en oublie un. Ce sont des voitures, bien entendu, en très bon état. La réservation se fait par téléphone ou internet. Les utilisateurs sont principalement des habitants du centre-ville qui n’ont bien évidemment pas de voiture, qui n’ont pas envie d’en avoir une, pour toutes les raisons que l’on connaît.

K : Comment avez-vous été amenée à imaginer ce type de solution ?
C’est un ami qui était inscrit chez AutoPartage qui m’en a parlé, puisque lui également travaille à la maison, a des clients un peu partout, est amené à se déplacer puisque, lui, il vend des machines informatiques, il fait de la maintenance et cætera. Donc, quand tout se passe en centre-ville, tout va bien, mais dès que c’est en dehors... En plus quand il y a des machines à transporter... Il a trouvé ce compromis-là et quand il m’en a parlé, j’ai dit :" Je signe aussi".

K : Quel type de voitures sont mises à disposition ?
Ça va de l’urbaine (Smart, 206, donc petite voiture) à l’utilitaire. Je peux en disposer à n’importe quel moment, elles sont disponibles 24 heures sur 24. Les voitures sont prêtées sur des petites périodes, à l’heure ou à la journée ; il y a des tarifs journée. Après il y a des calculs à faire : si on la garde plus de 50 heures, les tarifs baissent... Il faut aller sur le site, il est bien fait, il y a même des simulations. Mais on ne peut pas louer pour un mois ou deux.

K : Le budget vous paraît-il lourd ?
Ce qui est économique ou pas, c’est en fonction du porte-monnaie de chacun ; certains pourront dire que c’est peut-être pas donné. Il faut s’abonner à l’année, ensuite on paye à la fois à l’heure d’utilisation (environ 1 euro) et au kilomètre (environ 20 cents d’euro). Il faut compter en plus, l’abonnement mensuel de l’ordre de 9 ou 10 euros. Le tarif comprend le stationnement de la voiture, l’entretien, l’essence, et puis l’utilisation.

K : Devez-vous annoncer le temps prévu d’emprunt du véhicule ?
Absolument, il faut effectivement faire une espèce d’élaboration du temps d’utilisation. Ça fait partie des petites contraintes. À savoir aussi qu’en fonction des périodes, les voitures sont moins disponibles. Pour les périodes de vacances scolaires, par exemple, il faut s’y prendre bien à l’avance. La société estime, je crois, une voiture à disposition pour six personnes. Ils sont un peu victimes de leur succès, le week-end, il faut s’y prendre un peu à l’avance, une petite semaine à l’avance, je pense aux week-ends de Pâques, de la Toussaint.

K : Pouvez-vous passer au débotté voir s’il y a une voiture ?
Oui, mais je ne peux absolument pas la récupérer comme ça ; si je vois une voiture libre dans le parking, je sors et je les appelle pour faire la réservation. Tout marche avec une carte magnétique, tout est à l’intérieur de la voiture : papiers et clés. Si je ne l’ai pas réservée, elle ne se débloquera pas, si je la réserve, elle sera programmée pour être débloquée. Donc à ce moment-là, les portes s’ouvrent et puis je me sers et je m’en vais.

K : Pouvez-vous emprunter un véhicule avec la même carte dans une autre ville de France, à Paris par exemple ?
Je ne sais pas. Oui, je pense, parce que quand on fait une location sur internet, ils nous demandent la ville et le parking où on la prend, donc je suppose que ça doit marcher sur toute la France, en tout cas sur Marseille, c’est sûr qu’on peut la prendre dans n’importe quel parking.

K : Déposez-vous la voiture à l’endroit où vous l’avez empruntée ?
Absolument.

K : La voiture est-elle contrôlée lors de la remise ?
Il y a des petites contraintes, comme pour une location de voiture classique : faire un état général de la voiture avant de la prendre et un état en la rendant, pour être sûr qu’on ne l’a pas abîmée ; il faut qu’il y ait un quart de réserve d’essence, au-dessous, il faut faire le plein dans deux stations bien précises. On les connaît après, les stations du centre-ville et d’ailleurs, à force de les utiliser. Si j’ai besoin d’une voiture trois ou quatre heures et que le plein est fait, à ce moment là, je peux l’utiliser comme je veux.

K : Quel est le parking le plus proche de chez vous ?
En ce qui me concerne, c’est Préfecture, j’habite boulevard de la Corderie, donc j’ai Pierre Puget à descendre pour récupérer une voiture, c’est moins avantageux que mon ami qui habite Notre Dame du Mont et qui a la voiture au cours Julien. Quand j’étais au Vieux-Port, j’utilisais le Centre Bourse, mais ce n’est pas le plus tranquille. Quand on est une nana toute seule, on évite un peu les ennuis, et c’est pas surveillé, c’est vrai que c’est pas marrant, un parking, la nuit.

K : Le parc automobile s’est-il développé ?
En terme de parkings, donc forcément en terme de voitures, puisque au début il y avait un parking ou deux et que là, on en est à cinq, et il faut compter entre deux et quatre voitures par parking.

K : Devoir annoncer que vous prenez la voiture, aller chercher l’essence, sont-ce des charges en plus ?
... Ce qu’on fait avec une voiture classique. Il y a pleins d’avantages. Il y a forcément des inconvénients, mais au même titre que d’avoir un véhicule à soi, je pense. Ce sont des véhicules qui sont quand même relativement neufs. Ils sont en excellent état.

K : Qui entretient les véhicules ?
C’est AutoPartage. Nous on ne s’en occupe pas du tout. Même s’il y a un problème, quel qu’il soit, une boîte à gants cassée ou quelque chose comme ça, on sait que la semaine suivante, si on reprend la voiture, la boîte à gants sera arrangée. Sans problème. En fait, je pense qu’il y a deux états d’esprit, celui du propriétaire de son véhicule et celui du locataire. Pour l’automobiliste qui a sa voiture, tout est contrainte : "Où je vais me garer, je vais tourner deux heures le soir etc...“ Quand on n’a pas de voiture, finalement, la seule contrainte, c’est d’aller la chercher. C’est pas une contrainte ; la réserver sur internet, ça prend une minute montre en main ; si on a un souci parce qu’on est dans les embouteillages, qu’on doit la rendre à telle heure, vite passer un petit coup de fil à AutoPartage leur dire : "Je suis bloqué(e), je vais être en retard", parce que parfois il y a des gens qui attendent après la voiture parce qu’on a réservé jusqu’à telle heure et qu’une autre personne arrive derrière, ça peut être effectivement une petite contrainte, comme quand c’est pas possible d’obtenir de rallonger, parce que quelqu’un l’attend.

K : N’êtes-vous jamais en contact directement avec une personne d’AutoPartage ?
Sauf si je suis bloquée dans un embouteillage et que je dois appeler, parce que j’ai pas de connexion internet dans la voiture, pas encore.

K : S’il fallait retenir une attitude, un comportement ?
Je pense que c’est vraiment une bonne idée, ça marche plutôt bien, et ce qu’il y a de marrant, c’est de voir les utilisateurs, il y a vraiment de tout, des gens qui travaillent, comme mon ami et moi. Une fois, on attendait une voiture, elle arrive à l’heure, et on voit des jeunes, complètement "Cours Julien", habillés avec..., avec un chien. C’est plutôt marrant et on se dit que tout le monde peut y avoir accès, c’est une très bonne idée.

K : Avez-vous l’impression d’être dans une démarche citoyenne ?
Non. Ma première démarche : je cherche du pratique et de l’économique. Dans un second temps je me dis que, puisque j’ai appris qu’une voiture peut servir à six personnes, ça peut faire six voitures en moins dans un quartier, donc moins de pollution et cætera, mais c’est très égoïste, dans un premier temps. Si on revient sur la question de l’économie, c’est intéressant si on ne l’utilise pas énormément, c’est à dire que, plusieurs jours par semaine, je pense que ça revient cher.

K : Est-ce que le principe d’AutoPartage est connu ?
Pas tant que ça. Moi, quand on m’en a parlé pour la première fois, j’ai trouvé ça révolutionnaire, j’ai trouvé ça génial. C’était l’année dernière. Mais j’en ai pas entendu parler plus que ça. Dernièrement, j’ai vu des autocollants sur les voitures, ce que je trouve moyen, surtout sur la vitre arrière, en terme de visibilité... Puis j’ai pas forcément envie qu’on sache que ma voiture est louée, je veux seulement me déplacer. Il me semble que c’est la seule pub qu’ils font.

K : Cette pratique se répand-t-elle par le fait d’en parler ?
En fait, les quelques personnes que l’on connaît au centre-ville ont l’avantage d’avoir un véhicule et d’avoir un stationnement, donc pour eux la question ne se pose pas. Sinon, le bouche à oreille, je suppose qu’il fonctionne puisqu’il a fonctionné sur moi.

K : Depuis combien de temps n’avez-vous plus de voiture ?
Depuis deux ans... un an.

K : Et ça vous manque ?
Ça m’arrive, oui, quand je pense à aller faire des courses. À des moments très précis : le soir, tard, si j’ai envie d’aller voir des amis ou d’aller à un endroit qui n’était pas prévu. Ça va peut-être vouloir dire qu’ils vont devoir descendre.

Propos recueillis le 14/02/06 par Patricia Rouillard.

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