Elle aime La Viste au point de ne pouvoir s’en éloigner plus de quelques jours et c’est presque la déprime. Ailleurs, c’est ennuyeux, il ne s’y passe jamais rien... C’est Corinne Beigbeder, mère au foyer et bénévole au centre social. La Viste au quotidien vue de l’intérieur, à bâtons rompus, on visite le quartier, on y fait les courses, on parle des habitants du 38, du 74 et de ceux de l’avenue, des clivages, des liens qui se nouent peu à peu, de la solidarité entre voisins, de la chaleur humaine si prégnante lors des fêtes de quartier. Le projet du Parc Hanoi ? Ce serait bien pour briser les cassures, promener les enfants et aller prendre l’air... quand les frigos déglingués, les canettes rouillées et les voitures brûlées auront été déblayés !
Koinai. - Alors, pour commencer, est-ce que vous pouvez vous présenter, nous dire ce que vous faites dans la vie ?
Corinne Beigbeder - Je m’appelle Corinne Beigbeder, je suis habitante au 38 La Viste, j’ai trois enfants, je suis pas mariée, je suis en concubinage, je suis parent déléguée de l’école primaire, je suis bénévole au centre social, je fais partie du conseil d’administration du centre social aussi, et voilà, j’ai une journée bien remplie avec les trois enfants et tout ça.
K. - Êtes-vous originaire de Marseille ?
CB. - Non, moi je suis de L’Ariège, et ça fait seize ans que j’ai été adoptée par les marseillais, d’abord par le mari, après par le restant de la ville. (Rires.)
K. - Depuis combien de temps habitez-vous la Viste ?
CB. - Seize ans passés... Je pense bien y rester bien longtemps, c’est un bon quartier. En fait, c’est pas un quartier, c’est une grande famille. S’il y a des soucis quelque part, on est tous solidaires, tout le monde est content quand il y en a un qui se marie, tout le monde pleure quand il y a une mauvaise nouvelle. Au niveau commerçants, on a tout à proximité, dans le quartier on a l’épicier Bouallem, à l’extérieur il y a le "ED", les boulangeries, la poste, des pharmacies. Pour sortir du quartier, il y a le 26, on est à un quart d’heure de Continent, donc il y a tout à côté, on a une école dans le quartier, on est bien desservi.
K. - Quelles ont été vos impressions à votre arrivée ?
CB. - Moi, quand je suis arrivée, les jeunes qu’il y avait, c’était des petits frères des copains de mon mari, donc ils étaient sympas, aimables et tout. Puis bon les générations grandissent, changent, donc là il y a une petite cacophonie, là des petits jeunes, des petits rebelles, mais bon ça se passe bien... C’est pas tous les jours sympathique avec tout le monde, mais bon, il y a une bonne ambiance, on se plaint pas trop, il y a pire dans d’autres quartiers, on a encore des dialogues avec les jeunes. Comme dans tous les quartiers, il y a des jours où ça va et des jours où ça va pas. On n’ a pas trop à se plaindre, on n’est pas un des quartiers les plus mal famés sur le secteur...
K. - Donc depuis seize ans est-ce que ça a changé ?
CB. - La mentalité des jeunes enfin... Maintenant les jeunes c’est un peu plus des rebelles. Nous on était moins rebelles quand on avait leur âge. Il faut essayer de comprendre le pourquoi du comment. Encore ça va, il y a du dialogue, heureusement ils comprennent qu’il faut parler et qu’il y en a qui veulent parler avec eux. Y a certains anciens qui sont là depuis quarante et quelques années dans le quartier, ils disent : « Oui, mais les jeunes... » Mais non, ils sont pas plus méchants qu’un autre, quand ils sont en bandes, ils font peur oui... Quand il y a la bande, moi, je passe à côté, ils me disent tous bonjour, voilà, il faut leur faire confiance ! Moi, je dis qu’ils sont pas bien méchants. L’autre jour, il y en a bien un qui a porté le sac à une mamie qui sortait de l’épicier, elle était chargée, de suite il l’a vu chargée : « Mamie, on peut vous aider ? ». Elle en a vu quatre arriver en même temps... Il y en a un qui a dit : « Mamie, ne vous inquiétez pas, je suis le fils de votre voisin, du bâtiment à côté. Je vous prends le sac", après elle était rassurée, mais c’est vrai que bon... (rires)
K. -Il y a donc une bonne entente entre habitants de la Viste. Les gens sont-ils fiers et contents d’habiter ce quartier ?
CB. - Ben, moi, honnêtement, par fierté, je vais vous dire oui. Moi, je suis une fille de la campagne, quand je suis arrivée à Marseille, ça été très dur pour moi. Chez moi c’était que des champs, ici c’était tout bétonné, que des bâtiments, sur le coup l’impression que j’ai eue, je connaissais personne à part ma belle famille. Et puis, en fréquentant ici le centre social Del Rio, et à l’école j’avais plein de copines qui étaient au LEP la Viste, donc on se voyait continuellement. Petit à petit, ça m’a apaisée, ça m’a calmée. Mon mari m’a présenté ses amis d’enfance du quartier, donc après je me suis rassurée toute seule. Les gens sont comme ils sont, mais ils ont tous un grand coeur, je pense que sur Marseille la chaleur y est, dans le coeur. Et puis j’ai été bien accueillie. Moi honnêtement, je me suis bien adaptée à Marseille et au quartier. Ce serait difficile pour moi maintenant de partir. Il y a pas mal de choses qui me rattachent au quartier, les gens, les rencontres, le centre social...
Si demain mon mari me disait, bon écoute, j’ai gagné au loto, on s’en va ou on reste à la Viste ? Même un quartier pas loin, non, je pourrais pas. Quand je pars en vacances, quinze jours de congés, au bout de trois jours déjà, je pense "quand c’est qu’on rentre !" Le restant des jours, il passe très lentement, même ma famille me dit "ça t’a chamboulé Marseille !" Ouais, je suis en train de m’emmerder là, vos vaches, vos champs, c’est bien, jen ai bouffé jusqu’à mes 21 ans, maintenant je suis une fille de la ville, il faut que ça bouge ! Au bout de trois jours, la campagne ça m’a reposée, pour revenir à Marseille pleine d’énergie, voilà.
K. - Quels sont vos liens avec les autres parties du quartier ?
CB. - Moi, j’habite au 38 dans la tour 2. Le plateau, je le fréquente pour les commerces, la poste, les pharmacies. Le plateau, en fait, c’est le noyau du village, et le quartier à côté, le 74, fréquente aussi les habitants du 38, grâce au centre. Mais on se fréquente pas trop parce qu’en fait, il y a une petite cassure quand même entre les deux quartiers tout simplement parce que le 74 a été très longtemps, et même maintenant, le quartier pour les aisés. Aujourd’hui, comparé à la cité du 38, le 74, si vous voulez est un logement 1% patronal, donc cette brèche-là y est, et depuis que j’y suis, il y a toujours eu cette brèche-là. C’était des fonctionnaires et c’est toujours des fonctionnaires, à la retraite ou des jeunes fonctionnaires, des cheminots... C’est un quartier très carré. À La Viste c’est pas pareil, ça bouge. Les barrières, on les a enlevées depuis longtemps, nous... On dirait que l’école primaire, qui est entre les deux, c’est une frontière. Si vous faite un tour dans cette cité [le 38], entre les détritus, les saletés, les trucs, les choses, des voitures toujours mal garées, il y les gens qui crient, les minots qui hurlent, enfin un quartier qui bouge quoi, qui vit... Vous arrivez là haut [au 74], il y a pas un bruit, c’est propre – là-dessus, par contre, je les envie parce que c’est propre –, on dirait qu’on est sur un autre monde, c’est ailleurs, c’est un autre quartier...
K. - Il y a une autre ambiance ?
CB. - C’est autre chose, mais même eux le disent sur nous : « Vous, vous êtes le quartier populaire, la masse... » Le truc, la barrière du langage, si on se comprend pas par la parole, on s’explique avec les mains... Là où c’est beau, c’est que le centre essaie de casser cette brèche. C’est là que c’est le plus dur pour eux, peuchère... C’est chouette que dans les bénévoles, il y ait des gens du 74 pour se mélanger à ceux du 38, les jeunes, les moins jeunes, dans les activités aussi pour qu’il y ait un lien quoi, parce que sinon la cassure y resterait...
K. - En fait, c’est le centre social qui rassemble le plus les habitants ?
CB. - Oui, à part les commerces qu’il a autour, s’il y avait pas le centre, ce serait bien terne. C’est le noyau qui rallie un peu ces deux quartiers-là...
K. - Comment décririez-vous le quartier en quelques mots ?
CB. - Jovial, animé, convivial, criard avec les enfants... C’est un bon quartier... Ça crie, ça chahute... t’es dans ton appartement, tu entends le voisin du dessus, t’entends celui d’en dessous, celui à droite, celui... ouais, mais après tu sors dans la rue, tu discutes avec ces gens là, tu oublies que c’est tes voisins, que tu les a entendu gronder l’enfant, claquer la porte... Tu oublies tout ça, c’est très convivial, même si on se connaît pas, on habite dans le même bâtiment, on va se voir décharger la voiture de courses, machinalement c’est instinctif, on va l’aider... Je te tiens la porte, tu décharges les courses. Si à l’école, il y en a une qui est en retard, elle va appeler l’autre : tu me les surveilles le temps que je finisse d’arriver... Voilà, c’est un petit village... Ça fait village parce qu’il y a Bouallem, l’épicier, entre le centre et l’épicier, c’est les deux centres du monde tous les deux... L’école c’est maternelle et primaire, donc les mamans, les familles on se voit là, ça fait que les enfants grandissent ensemble, il y a les activités au centre ce qui fait qu’ils continuent à se voir. Entre mamans on se voit toujours en fait, c’est pour ça que c’est une grande famille et puis la maternelle, je les connais tous. Les enfants sont allés à l’école ensemble, ils ont grandi, ils ont fréquenté les mêmes lieux. Peut-être qu’au collège ils vont aller après ensemble. Vous savez que ça fait plus penser à un petit village sympathique au fond de sa montagne là, tout le monde se connaît et tout le monde connaît tout le monde et voilà, ici c’est pareil on se connaît tous... Tant aujourd’hui il y a de la haine, demain il y a plein d’amour quoi. C’est Marseille...
K. - Qu’est-ce que vous aimez particulièrement dans ce quartier et qu’est-ce vous aimeriez voir changer ?
CB. - Ce que j’aime moi, c’est ça, la convivialité du quartier. On parle, il y a du dialogue, peut être pas assez avec certaines catégories de gens comme les jeunes, les 15-18 ans, la maman de 35 ans qui leur dit : « Les jeunes, faites moins de bruit ou quoi... » C’est bon, ils apprécient pas trop mais deux minutes après, ça rigole un coup, ça passe quoi... Changer non, rien changer, la mentalité, il y a une bonne ambiance, quand il y a des fêtes de quartier, il y a cette chaleur-là qui arrive, une semaine avant ça y est, tout le monde dit : ce week-end il y a ça c’est chouette... (Rires.) Voilà, dès qu’il y a quelque chose de festif, il y a une ambiance, c’est chaleureux... Après, à changer ? ce serait changer les bâtiments mais pas les gens. (Rires.)
K. - A propos du parc d’Hanoï, vous disiez tout-à-l’heure que vous le connaissiez un petit peu. Le fréquentiez-vous ?
CB. - L’autre jour, mes enfants m’ont dit : « Maman, on passe par le chemin ? », je dis : « Bon, ben c’est l’hiver, on va pas trop bien y voir, il va faire nuit de bonne heure, on sort de l’école et on passera par là, je vais aller à Continent faire deux courses, bon on va passer par là. » Avec mes deux grands, quand on est arrivé, je doutais, je dis j’y passe ou j’y passe pas, parce que, il faut dire ce qui est, c’est sale, il y a les voitures brûlées, il y a les machines à laver, il y a des canettes de partout, c’est pas entretenu à 100% quoi, c’est bien dommage, et plus on descendait vers le belvédère pour aller sur Continent, par contre, là, oui, c’était actif, on voyait des gens, des groupes de jeunes, des adultes, au parc sportif qu’il y a en bas, qui s’amusaient, il y en a d’autres qui faisaient des activités sportives normales... Ça m’a gêné, honnêtement, ça attire pas les gens... Entre ceux qui habitent là et qui ont cette vie-là, peuchère, et les gens qui ont envie de passer par là pour se faire plaisir, en disant tiens, on va continuer, on y va en ballade et pas forcés, faire des courses, ça fait un petit truc sympa, c’est loupé ! Ce côté là, c’est loupé, honnêtement...
K. - Qu’est-ce que vous aimeriez voir changer donc ?
CB. - Aménagements, j’ai vu qu’il y avait un espace cross, c’est sympa, ça ! Les jeunes qui ont les vélos, les motos, et les VTT, tout le long du parcours là, au niveau du sol, c’est vrai que c’est des gros cailloux... De refaire juste la descente, ce serait pratique, qu’on puisse accéder avec les poussettes...
K. - C’est dangereux ?
CB. - Autre que dangereux ! C’est un petit quad qu’il aurait fallu... Sinon, il y a déjà des aménagements comme le cross, le parc sportif là en bas. À la limite, qu’ils fassent des bancs, des petits coins famille, ça dérange personne. Le cross est en haut, il dérange personne, les activités sport, elles sont en bas, elles dérangent personne, mais entre les deux, il y a rien. Je pense, je sais pas, je dis honnêtement je suis pas architecte, mais peut être qu’ils peuvent aménager un petit coin sympathique. Il peut y avoir des personnes d’un certain âge pour aller tricoter, passer la journée à l’ombre l’été.
K. - Si vous parlez d’Hanoi, en fait, un coin convivial, pour aménager, pour que ce soit un lieu plus familial, plus convivial, ce serait un lieu où il aurait l’ensemble des gens du quartier qui se rencontreraient ?
CB. - Alors, garantir que les gens du quartier, la Viste, puisque j’habite là, vont dire "ouais, ça y est, Hanoi, il est bien, il est gnagna... on y va tous". Je veux pas m’avancer, mais il sera certainement beaucoup plus fréquenté que ce qu’il est en ce moment, ça c’est sûr. S’il est mieux aménagé, déjà honnêtement, je sais pas si vous avez sondé des personnes d’un certain âge, mais ils y sont jamais allé, il y en a aucun qui y va. Moi, j’ai discuté avec une personne qui m’a dit "non, tu veux y aller quand ? Comment ? Tu as vu comment c’est abrupt." Et si on les amène en voiture, elles marchent dans l’herbe, et elles disent "Oui, mais il y a quoi à faire là-bas ?" Et là, elles ont pas tort, donc il y a peut être des petites questions à se poser. Quelle population ils veulent vraiment toucher ? Parce qu’ils ont fait une partie cross qui est très bien, ça évite d’avoir les motos-cross de partout sur la route. Pour les VTT, c’est pareil, ils risquent pas de se faire renverser par une voiture au moins. Là-bas, ils peuvent s’éclater, ils tombent, ils se fracassent mais bon, il y a un endroit pour, c’est très bien. Ils ont le parc sportif, c’est génial aussi, un petit parc sympa tout en bois, c’est pour les jeunes et les moins jeunes. Après, on se dit : Est-ce qu’il faut en faire un parc que pour les sportifs ? Mais, alors, il va falloir des aménagements pour les sportifs, un parcours pour courir, un parcours... pour sauter... Ou est-ce qu’ils veulent en faire un lieu où tout le monde peut y aller ? Aussi bien en vélo, faire un parcours cycliste simple pour les gens de tous les jours, avec leurs enfants. Faudrait voir ce qu’il veulent vraiment en faire, il y a des belles choses à faire. Alors moi, j’en ferais un Brégante mélangé avec Billoux. Ce style-là de parc, qui sont complètement à l’opposé. Billoux, c’est à la mairie du quinzième, il y a des parcs d’animation pour enfants, il y a le jet d’eau, etc. Et Bregante qui est très fleuri, qui a un parc pour enfants aussi, qui a un côté qui est très ombragé... comme les jardins des petites villes, tout ombragé. On voit les mamies sur les bancs en train de tricoter, papoter. Voilà, c’est un parc comme ça que j’aimerais, vivant. Qu’il vive grâce aux petits et aux anciens.
K. - Et aussi des endroits où on peut se reposer ?
CB. - Comme je vous disais dans l’état où il est, il aurait bien besoin d’être réaménagé. On pourrait rajouter des bancs, des lumières, ne serait-ce que ça, déjà ça attirerait un peu plus les gens, ils se sentiraient plus en confiance. Ils auraient envie de venir en fin de soirée, l’été, faire une petite promenade. Il faudrait rajouter des jeux pour enfants, en faire un parc familial. C’est un lieu où l’on peut faire beaucoup de choses. Les habitations sont loin, ça ne poserait donc pas de problèmes au niveau du bruit.
Et puis, il y a une partie en pente, une partie plate, on peut faire plusieurs choses, un parcours cycliste, un parcours pour les piétons, c’est immense. Il faut voir... mais il y a des choses magnifiques à faire. C’est beaucoup de travaux, mais ils en sont pas loin, et c’est bien dommage de passer à côté de ça ! Maintenant je pense qu’en entretien, ça doit coûter beaucoup plus cher...
Là, il n’est pas aménagé, mais il est pas trop abîmé. La partie plate n’est pas trop abîmée, parce qu’il n’est pas très fréquenté, mais toute la partie en pente est saccagée. Il y a des ordures, c’est même pas des ordures ménagères, c’est un frigo, c’est des roues, c’est des voitures volées...
Je crois que certains ce sont dit "C’est un terrain vague, il y jamais personne, on peut faire ce qu’on veut." Bon, maintenant c’est fait, mais pour sortir tout ça, de là, c’est autre chose. Donc, c’est plutôt ce côté-là, cet abandon qui me dérange.
J’envie les gens qui habitent au Boulevard d’Hanoï, pour la vue qu’ils ont. Parce que quand vous êtes là-haut, vous avez tout le port, en face. Vous voyez les bateaux partir, arriver, vous avez tout le littoral à côté, Mourepiane et tout ça à vos pieds, vous voyez L’Estaque, c’est magnifique. Mais si vous vous penchez vraiment, vous voyez un congélateur, une voiture brûlée ou autre...
K. - Ca a toujours été comme ça ?
CB. - Non ! Au début, je l’ai connu, c’était tout neuf, tout beau. Honnêtement ça fait bien deux ans que j’y ai pas mis les pieds. Un jour, j’ai dit "on y va", mais même mon fils m’a dit "maman, c’est pourri !"
K. - Là pour finir, de façon plus générale, sur la Viste, quels seraient les aménagements, les projets pour mieux vivre ensemble ?
CB. - Oh la la ! On en revient toujours à... il faut dire ce qui est, le belvédère ferait du bien. Parce que là ça fait quartier, quartier et le village.
K. - Cette cassure ?
CB. - Oui, ça fait une petite cassure. On fait partie de la Viste, mais quand on est en centre ville par exemple, et qu’on nous demande où on est, on dit pas "A la Viste", on dit "Au 38 à la Viste". Et à la cité à côté ils vont faire pareil : "74 à la Viste". C’est 38, 74 et l’avenue. Par contre, au niveau commerçants, ils sont formidables ici dans l’ensemble, parce qu’ils sont là, ils bougent avec tout ce monde là. Heureusement qu’ils sont là, ils donnent ce côté tonus à la Viste, parce que la Viste c’est grand !
K. - Ces commerçants là en fait, sont commun au 38 et au 74 ?
CB. - Boualem, oui, puisqu’il y a les gens du 74 qui amènent les enfants à l’école, et en passant ils achètent le pain. Si t’as besoin de sucre, au lieu de partir à Continent tu es habitué à Boualem. Et les mamies qui sont pas véhiculées pour aller dans les grandes surfaces, c’est Boualem qui s’en occupe. Donc, si demain on venait à dire que Boualem, l’épicier du 38 ferme, je crois qu’il y aurait une révolution dans le quartier ! C’est l’épicier de quartier, il a pas tout et c’est très bien, parce que ça permet d’aller ailleurs aussi, il faut pas oublier qu’il faut sortir du quartier aussi. Parce qu’on achète le tabac là, le pain là, c’est bon, au bout d’un moment... Avant que j’arrive il y avait plein de commerçants, c’était animé le quartier, il y avait une épicerie, une boulangerie, une droguerie, une chapelière, il y avait tout ça comme magasins dans ce quartier.
K. - Ils sont partis ?
CB. - Au fur et à mesure avec le temps, les chapeaux, ça se faisait plus trop, donc ils ont fermé boutique. La boucherie pareil, tous les méditerranéens commençaient à arriver en masse, dans les quartiers nord et au niveau "boucherie traditionnelle française", il a fallu modifier et ça allait pas, donc il a dû fermer. Il y a des métiers, c’est dommage qu’il se sont perdus, mais les magasins n’ont plus lieu d’être, n’ont plus d’utilité. Quand je parle avec les personnes du troisième âge, elles nous disent que le 38 était un quartier très animé. Dans leur jeunesse, ils fréquentaient l’école d’ici, le plateau et tout, c’était très animé et très ouvrier. C’était des gens du port, donc ça vivait, il y avait beaucoup d’enfants, de familles... C’est pour ça que je dis "merci" aux commerçants de l’avenue, parce que ça bouge encore la Viste, on arrive encore à faire des choses. On habite le même quartier, géographiquement c’est très large la Viste, mais en fait on se connaît tous, donc on est tous collé les uns aux autres.
Il y a un coiffeur, il y a le LEP la Viste, il y a ED, 123-Market, les cinq six commerçants qu’il y a juste en dessous. Franchement, je leur tire mon chapeau, parce que je sais pas comment ils font, ça rentre, ça sort de ces magasins, c’est la folie. Mais ça bouge et ça vit. La Viste vit, voilà !
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